Et soudain, Jorgenson attaqua
C'est dans un décors apocalyptique, sous la grêle à 2300 mètres d'altitude que l'étape reine a trouvé son roi. Celui-ci, Ben O'Connor, a bravé en solitaire l'interminable Col de la Loze, toit du Tour 2025. Les Visma, qui avaient à un moment les cartes en main en ayant isolé Pogacar après la Madeleine, ont tenté un mouvement très étrange qui a tourné au fiasco. Il ne reste qu'une étape de montagne mais Pogacar semble avoir définitivement remporté ce Tour. Retour sur une étape qui démarrait si bien, avant de se dégonfler d'un coup.
| Jonas Vingegaard, ici dans la Loze en 2023 où il volait, n'a pas réussi à reproduire cette performance |
Ce devait être l'étape où Visma tentait de relancer le Tour pour le renverser vers La Plagne. Cela avait bien commencé pour eux puisque Jorgenson s'était glissé dans l'échappée en compagnie d'un Primoz Roglic rempli de panache, forçant UAE à rouler. Le plan a pris une toute autre tournure dans la Madeleine (19.3km à 7.8%) où un tempo exceptionnel a été imprimé par Campenaerts avant que celui-ci ne soit relayé par Simon Yates et enfin Sepp Kuss. Par leurs changements de rythme, les frelons ont, petit à petit, grignoté le tissus du peloton et l'a transformé en haillons à trois fils : Pogacar, Kuss et Vingegaard. Après le tempo insoutenable de l'Américain, Jonas Vingegaard a accéléré une première fois mais son fidèle acolyte jaune l'a suivi très aisément. Très vite, ils sont retombés sur une échappé où Jorgenson pouvait désormais donner l'allure.
Arrivés dans la descente, les deux équipiers s'y sont jetés tombeaux ouverts, presque prêts à faire partir Pogacar à la faute, ou du moins, fatiguer de stress cette viande jaune, pour l'achever plus tard. Seulement, au bas de cette descente infernale, l'approche des Visma a changé, et avec leur choix, le sort de l'étape et peut-être du Tour. Pogacar était isolé, Primoz Roglic, Félix Gall, Rubio et O'Connor n'allaient pas rouler. L'allure était entre les mains des Jumbo.
Jorgenson suit une attaque, plus personne ne roule et tout le monde revient.
Seulement, les quinze kilomètres de plat espaçant le bas de la descente de la Madeleine et le pied du Col de la Loze ont totalement fait revoir leur plan aux Visma. Ne souhaitant pas faire rouler Jorgenson afin de le garder pour la Loze, celui-ci s'est arrêté de rouler. On a presque cru qu'ils perdaient leur calme en demandant aux autres de relayer, comme s'ils allaient tranquillement accepter. Face à ce ralentissement, les très malins O'connor et Rubio ont attaqué, suivis par Jorgenson. L'Américain, dont on s'est même demandé s'il ne servait pas ses intérêts personnels, a relayé les deux hommes de tête, comme au début de l'étape, retour à la case départ.
Derrière, on ne roulait plus, 25km/h sur du plat, une allure de trottinette électrique bridée. Cette vitesse qui nous permettrait de les suivre en criant, "c'est pas si dur d'être cycliste !", a remis tout le monde dans le jeux, d'abord Lipowitz qui était à la traîne, puis l'intégralité du groupe qui avait sauté dans la Madeleine. Visma est passé en quelques instants, d'une situation où ils avaient tout entre les mains, où Pogacar pouvait potentiellement manquer de sérénité, à une situation où celui-ci a pu se calmer, souffler et récupérer son équipe.
La Loze : O'connor au bout de l'ennui
Dans la Loze, rien ne s'est reproduit comme dans la Madeleine. Le groupe de tête a obtenu une avance de trois minutes sur Lipowitz qui avait anticipé et la clé de voute du projet : Mattéo Jorgenson a cédé face à l'allure d'O'connor. Les équipiers de Vingegaard, à l'initiative du coup de force du Col de la Madeleine n'étaient, cette fois, pas capables d'essorer le peloton. UAE a profité de la risible situation pour prendre le relais et tranquillement endormir tout le monde. O'Connor à l'avant, est allé cueillir le succès après près de 10km en solitaire et Pogacar, en maîtrise, n'a dû suivre qu'une accélération de Vingegaard puis sprinté, comme à son habitude pour reprendre quelques secondes (11). RedBull-Bora, qui n'a pas non plus roulé dans la plaine avec Roglic et Lipowitz passe proche de tout perdre puisqu'Onley, épatant, ne termine qu'à quatre secondes de Vingegaard et revient à 22" de Lipowitz qui a perdu gros dans l'ascension.
Visma avait un plan, semble ne pas être allé au bout, et perd encore du temps pendant que Pogacar jubile. Nous ne saurons jamais s'il y avait la place, d'ébranler quelque peu la sérénité de l'ogre slovène. Après ce nouveau revers, la tâche semble désormais impossible.
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